City Beat : Une autre affirmation sommaire sur l’exode urbain dû au Covid
Encore une fois : Ce sont des anecdotes, et non des données, qui alimentent les affirmations d’un exode urbain dû au Covid-19
Le virus est désormais plus mortel dans les zones rurales du pays qu’il ne l’est dans les villes, ce qui sape les bases de la théorie de l’exode urbain
Depuis les premiers jours du coronavirus, les médias ont régulièrement diffusé des discours anti-villes, une sorte d’écho du 21ème siècle des « tenements grouillants », accusation de la prétendue insalubrité de la vie urbaine au 19ème siècle. Au printemps, les pires épidémies se sont produites dans la zone métropolitaine de New York, ce qui a automatiquement conduit de nombreuses personnes à assimiler la taille et la densité à un risque de pandémie. Comme nous l’avons noté, l’histoire canonique est généralement le produit d’un journaliste qui cite un agent immobilier de banlieue à propos d’une vente qu’il vient de faire à quelqu’un qui a déménagé de la ville. Mais comme nous l’avons noté à maintes reprises, et encore une fois, les données ne soutiennent pas la théorie de l’exode urbain.
La semaine dernière, nous avons vu un autre titre provocateur sur la montée en flèche de l’intérêt pour la vie en banlieue, cette fois par des analystes habituellement fiables de John Burns Real Estate Consulting (JBREC). Ils ont affirmé que
Nous avons tous entendu les récits de la migration actuelle des locataires vers les banlieues et même vers les exurbs dans certaines parties du pays. Jusqu’à présent, l’histoire de la migration qui captive le secteur du logement était surtout anecdotique. Mais nous en avons maintenant la preuve ! Notre récente enquête nationale auprès des opérateurs de location de logements individuels (SFR) fournit des données concrètes confirmant le mouvement de migration amplifié par la pandémie.
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59% des nouveaux locataires de SFR se déplacent à partir de lieux urbains, et 41% des nouveaux locataires se déplacent à partir de lieux déjà suburbains.
Nous avons examiné de près le rapport. Son seul point de données clé est le suivant : Dans leur enquête, 59 % des personnes qui louent des maisons unifamiliales des participants à l’enquête déménagent de zones urbaines.
Nous n’avons aucune raison de douter de l’exactitude de cette statistique, mais sans un peu plus de contexte, il est impossible de savoir ce qu’elle signifie. Plus précisément, nous ne savons pas si le pourcentage de 59 % de nouveaux résidents provenant de zones urbaines est plus élevé qu’avant la pandémie, ou plus faible, ou s’il est influencé par la saisonnalité ou d’autres facteurs. Nous avons contacté Devyn Bachman du JBREC, qui nous a confirmé qu’ils n’avaient pas de données pour l’année précédente, et nous a dit que la hausse était basée sur des rapports anecdotiques. L’essentiel n’est pas de connaître le nombre de personnes qui quittent les villes pour les banlieues, mais de savoir si cette tendance s’est sensiblement modifiée par rapport aux années précédentes. Et là encore, ce que nous avons, ce ne sont pas des données sur un tel changement, mais simplement des anecdotes.
Il faut aussi garder à l’esprit que les logements locatifs unifamiliaux de banlieue constituent un segment relativement petit du marché (la plupart des locations sont encore multifamiliales). Et l’enquête de Burns est un échantillon de propriétaires de logements unifamiliaux à plus grande échelle, appartenant à des institutions, qui constituent un segment important et croissant du marché, mais une minorité décidée de propriétaires de logements unifamiliaux.
La pandémie est maintenant bien pire dans les réas ruraux
Le fondement de l’hypothèse de la « fuite urbaine » est la notion que les villes sont largement plus risquées que les banlieues ou les zones rurales : en fuyant, vous pouvez réduire votre risque de devenir Covid. L’article de JBRE qui défendait l’hypothèse de la fuite urbaine semble aujourd’hui un peu dépassé à la lumière des données récentes sur la propagation du Covid-19. S’il était vrai que les cas et les décès par habitant étaient plus nombreux dans les villes au printemps, ce n’est plus le cas. En fait, la relation entre la taille des villes et la mortalité due au Covid-19 est désormais inversée, les taux de décès par habitant les plus élevés étant enregistrés dans les communautés les plus rurales et les moins denses du pays. Si l’on se base uniquement sur les facteurs de localisation, ceux qui ont fui à la campagne plus tôt dans l’année ont désormais statistiquement beaucoup plus de risques d’être diagnostiqués et de mourir de la maladie que leurs homologues urbains. Nos amis du Daily Yonder ont fait la chronique de ce sinistre changement dans les taux de mortalité :
La nuance ici semble être que les villes et les grandes zones métropolitaines sont plus étroitement connectées au reste du monde, et bien qu’exposées au Coronavirus en premier, et à une époque où la connaissance du danger du virus et des mesures préventives était limitée, il n’y avait rien dans l’environnement urbain qui rendait ses résidents plus sensibles au Covid. Au fur et à mesure que la pandémie se propageait, les zones plus faiblement peuplées qui étaient isolées du virus principalement en raison de connexions moins fréquentes et moins robustes avec d’autres endroits ont cessé d’être des refuges.
« La fuite urbaine » comme hystérie journalistique collective
NPR’s On the Media a examiné de près ces histoires et a conclu que le mème de « fuite urbaine » est à la fois répandu et complètement faux. Dans un article incisif du site immobilier Curbed, Jeff Andrews attribue la popularité de ces histoires aux préjugés des journalistes :
Comme l’industrie des médias est concentrée à Manhattan – avec une autre bonne partie à San Francisco – les journalistes semblent confondre la migration sortante mineure de deux zones ridiculement chères avec la double dose de demande qui se produit à travers le pays.
Plus insidieusement, certains membres des médias sont prêts à colporter des histoires sur un carnage inexistant dans les rues, extrapolant que les villes – toutes les villes, mais surtout celles qui sont diverses et dirigées par des démocrates – se dirigent vers un effondrement inévitable. Et il est difficile de ne pas séparer ce sombre fantasme d’un point de discussion républicain.
Mais, selon les données, cela ne se produit tout simplement pas.
L’idée que la pandémie a bouleversé les marchés immobiliers et déclenche un flot de migrants vers les banlieues et les zones rurales a un énorme attrait pour les journalistes et leurs rédacteurs. Malgré les anecdotes contraires, il n’y a pratiquement aucune donnée qui montre que c’est ce qui se passe.
City Beat est la rubrique occasionnelle de City Observatory qui repousse les histoires des médias populaires qui, selon nous, s’en prennent à tort aux villes.